Pour la première fois en France, des influenceurs visés par une plainte pour escroquerie en bande organisée.
« C’est historique. » Dans la voix de cette bénévole du collectif AVI (Aide aux victimes d’influenceurs), jointe par 20 Minutes, on sent un brin d’émotion.
Forcément, depuis juin dernier, les bénévoles du collectif se réunissent tous les soirs dans un « espace » sur Twitter pour trier pendant des heures les nouvelles plaintes et discuter des éventuelles enquêtes.
A noter également que le collectif a changé de nom entre-temps. Historiquement nommée AVNM (Aide aux victimes de Marc et Nadé), l’association ne s’en prend plus seulement au couple Blata, mais à tout influenceur décidant de jouer avec l’argent de ses abonnés.
Qu’importe, lors de la première conférence de presse du collectif donnée ce lundi dans le 16e arrondissement de Paris, il sera question du couple Blata composé de Marc et Nadira (alias Nadé). Entre autres.
Aux côtés de Ziegler & Associés, cabinet d’avocats spécialisé en droit bancaire et en droit de l’informatique et du numérique, le collectif annoncera déposer deux plaintes pour escroquerie en bande organisée.
Une première en France. Des plaintes individuelles avaient bien sûr été déposées avant, sans jamais avoir un impact considérable derrière. Ici, la force du collectif entend changer la donne.
6,3 millions de dollars volés
La première plainte concerne le projet Animoon, un projet NFT financé par près de 5 000 investisseurs à travers le monde.
Surfant sur la vague du web3, le projet a utilisé des images de célèbres Pokémon,
laissant entendre que la marque les avait autorisés.
Mais rien, zéro partenariat n’a vraiment été signé, contrairement à ce que Marc Blata laissait imaginer sur ses réseaux sociaux.
Au total, le projet a levé près de 6,3 millions de dollars… mais s’est avéré être une grosse arnaque.
« Ils avaient annoncé un projet avec des cadeaux. Il n’y a plus rien de tout ça maintenant, que des cartons vides », assure le collectif AVI.
Parmi ces cadeaux, des vêtements luxueux ou des voyages au bout du monde et bien sûr des NFT.
Si l’arnaque est internationale, certains influenceurs français se sont retrouvés impliqués dans le projet.
Comme on le disait plus haut, c’est le cas de Marc Blata qui en avait fait la publicité sur ses réseaux sociaux.
Le même Marc Blata, d’ailleurs, qui a initié le « gang Blata », visé par la deuxième plainte que le collectif va déposer.
Devenez trader en un rien de temps
Abonné à toutes les arnaques, l’ancien candidat de télé-réalité a récemment
été pointé du doigt pour son activité lucrative lancée dans le trading.
Et au risque de se répéter sur ce feuilleton, voici un petit rappel des faits.
Depuis plus de deux ans, depuis leur luxueuse villa de Dubaï, Marc et Nadé Blata
proposent à leurs fans de les suivre dans des activités de copy-trading.
Tout cela via la plateforme Telegram très accessible.
Une affaire présentée comme une véritable mine d’or qui s’avère pourtant particulièrement dangereuse.
Pour rappel, l’Autorité des marchés financiers (AMF) avait calculé entre 70 et 80% de pertes pour ces produits.
Cependant, aujourd’hui, il reste très compliqué de chiffrer les pertes des victimes de Blata gang, contrairement au projet Animoon.
Outre son caractère « historique », les bénévoles du collectif AVI espèrent que cette plainte débouchera sur l’ouverture d’une enquête, malgré l’éloignement de Dubaï.
« L’objectif est d’arrêter tout cela et de reconnaître les nombreuses victimes qui ont dû être à l’origine d’une partie des lourdes pertes », regrette le collectif.
Aussi, grâce à ces plaintes, les bénévoles souhaitent sensibiliser le public, jeune ou non, aux nombreux excès des influenceurs.
Drop shipping, l’arbre qui cache la forêt
Des plaintes qui interviennent aussi après un meeting tant attendu à Bercy organisé par le ministre de l’Economie début décembre.
Suite à la table ronde avec les influenceurs [mais aucun de ceux concernés] Bruno Le Maire a annoncé le lancement d’une consultation « pour accompagner et encadrer les influenceurs ».
Est-ce suffisant par rapport à l’ampleur du phénomène ?
« C’est très bien de dialoguer pour sensibiliser, mais c’est presque cantonné au drop shipping. Sauf que les dérives des influenceurs vont plus loin aujourd’hui : produits financiers, cagnottes humanitaires, faux produits de marque ou encore pratiques médicales illégales. Discuter c’est bien, mais à un moment donné, il faudra agir », regrette le membre du collectif.
Selon cette dernière, des moyens restent à prévoir pour appliquer les lois réglementaires.
« Notamment pour la Direction de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) », souligne le collectif.
A l’avenir, une meilleure régulation des plateformes est également demandée.
En effet, alors que Snapchat a inclus des règles plus strictes dans sa réglementation pour réglementer le métier d’influence, Instagram accuse toujours un retard dans la modération des contenus riches en arnaques.
D’autres plaintes à venir ?
Ce lundi marquera donc un nouveau tournant dans le métier d’influenceur.
Alors que pour la première fois en France, des influenceurs seront visés par des plaintes d’escroqueries en bande organisée, d’autres pourraient suivre à l’avenir.
Hors radar pour le moment, les dossiers s’amoncellent contre l’ex-candidat de télé-réalité Dylan Thiry.
Faux jackpots pour voyages humanitaires et promotions de médicaments contre le cancer… les excès d’influence n’ont pas de limite. Et le collectif AVI l’a bien compris.